La définition proposée ici concerne uniquement les sociétés humaines. La société peut se définir comme la forme type des diverses sociétés humaines existantes. Les humains vivent entourés d’autres humains dans un milieu constitué par leur activité laborieuse. Au sein de ce milieu, se tissent des liens de divers ordres : interdépendances concrètes, échange verbaux et culturels, relations codifiées selon des règles et toute une hiérarchie, des sentiments et de mouvement affectifs.
Il se constitue, grâce à ces liens et interdépendances, des groupements humains qui se présentent comme des ensembles complexes qui s'organisent à la fois spontanément (auto-organisation) et aussi de manière consciente et formalisée (lois, institutions). Les interactions entre les membres du groupe formant société sont liées aux capacités de communication, aux activités techniques et à la division du travail, aux échanges intellectuels et culturels, aux transferts de biens et de services. Ces actions produisent un milieu qui environne les humains dès leur naissance. Ce milieu social humain est fortement marqué par la technique et la culture.
Pour caractériser un fait social, nous avons choisi trois caractères qui ont paru nécessaires : le caractère collectif, le caractère contraignant, la médiation culturelle et institutionnelle. Un fait, pour être qualifié de social au sens simplement empirique-descriptif, doit concerner un grand nombre d’individus (parfois tous les individus). Les conduites objectivement descriptibles s’imposent, que les individus le sachent ou pas, avec ou sans coercition. La plupart du temps, c’est sans coercition, car les déterminations sont intégrées et ignorées. Les mœurs sont typiques de ces faits sociaux qui s’imposent spontanément. Les mœurs sont adoptées et respectées spontanément, et, si besoin est, elles sont imposées par des lois.
On trouve toujours des rapports de force, des volontés de domination et d’exploitation au sein des sociétés et entre sociétés concurrentes. En contrepoint, il y a également des lois générales et des règles particulières qui limitent la violence et ordonnent les relations. Les sociétés humaines sont marquées par altricialité qui impose une longue période d’élevage des enfants, ce qui permet la transmission culturelle par apprentissage et grâce au chevauchement des générations. Cette transmission technique et culturelle a été favorisée par l’utilisation de l’écriture sur des supports stables et faciles transmettre. La division entre homme et femmes dont le rapprochement est nécessaire pour la perpétuation de l’espèce est régi par des interdits et prescriptions qui organisent les familles et plus largement la société dans son ensemble.
D'un point de vue pragmatique, la société clive les individus entre leur besoin d'appartenance et leur opposition aux autres, par intérêt, par refus de contraintes jugées injustes, insupportables, ou contraires à leur autonomie. D'où l'expression d'Emmanuel Kant d'une « insociable sociabilité » de l'homme (die unsoziale Geselligkeit) que l'on trouve dans l’Anthropologie d'un point de vue pragmatique (1798).
Le social représente-t-il une forme d'existence réelle et originale (à différencier du biologique qui caractérise les humains en tant que vivants) ? La question est controversée. Pour les uns, une société n'est rien de plus que les individus qui la composent, liés par un but commun. Pour les autres, le social a une existence propre en qualité d'organisation stable ayant émergée de l'interaction de ses composants.