Le concept de mégamachine désigne le système technique, économique et politique qui structure la plupart des sociétés industrielles. Le mot à une force d’évocation intéressante. Il renvoie à l'utilisation massive de la technique en lien avec le pouvoir politico-économique.

Le terme de mégamachine, a été proposé par l’historien et philosophe des techniques Lewis Mumford dans son œuvre Le Mythe de la machine (The Myth of the Machine, 1967-1970), pour désigner l'association entre les systèmes techno-industriels et économico-politiques. Mumford vise les organisations sociales hautement centralisées et technicisées qui fonctionnent comme une immense machine au sein de laquelle les humains deviennent les rouages d’un système bureaucratique et technologique. Il s’appuie sur des exemples historiques, notamment les États despotiques de l’Antiquité (comme l’Égypte des pharaons ou l’Empire assyrien), où le pouvoir centralisé mobilisait d’immenses masses humaines pour des projets de construction (pyramides, fortifications, etc.), transformant ainsi la société en une gigantesque machine sociale.

Le développement des technologies modernes de l’informatique et de l’automatisation, risquent de renforcer cette politique de contrôle et de déshumanisation. Mumford critique les visions optimistes du progrès technologique et met en garde contre une société dominée par des structures technocratiques et militarisées.

Le terme a été repris par Fabian Scheidler. À l’origine de la mégamachine, l’auteur place la volonté de domination et la violence organisée. L’auteur considère la volonté de domination comme l’origine du développement de la mégamachine. Cette volonté porte sur les humains, sur les choses, et plus généralement sur la nature. On la retrouve à l'œuvre depuis l’Antiquité jusqu'à la période moderne.

Le système s’appuie sur le pouvoir physique fondé sur de la violence, le pouvoir socio-économique qui enrôle et dompte (en particulier au moyen de la dette), et le pouvoir idéologique qui légitime l’asservissement. Schneider insiste sur l'engrenage asservissant entre le besoin en capital et l'endettement. Ces contraintes engendrent une quatrième tyrannie, la tyrannie de la pensée linéaire, c’est-à-dire l’idée d’une relation entre une cause et un effet unique et prévisible, à la manière d’un ordre donné. Ces quatre tyrannies forment les briques de base de la mégamachine.

Il s'agit d'un système au sens où tous les aspects sont interdépendants. Le pouvoir du capital n'aurait pu se développer dans la violence de l'État, ni cette dernière sans le capital, les deux étant liés à la croissance de l'industrie métallurgique, l'ensemble légitimé par des idéologies prétendûment universalistes (Fabian Scheidler). 

L'énorme développement de l'informatique et de l'intelligence artificielle, qui est se met en place au XXIe siècle, renforce la mégamachine. Il tient un rôle majeur dans la course à la puissance des États. Ses effets politiques et sociaux sont déjà présents et insuffisamment questionnés. Le transhumanisme en constitue le versant idéologique optimiste. Les pessimistes y voient la possibilité d'un contrôle totalitaire parfait par une surveillance électronique à la puissance décuplée par l'intelligence artificielle.