À quoi bon reparler d'humanisme ? Au vu des doutes et incertitudes actuelles, il serait probablement utile de réinventer un récit philosophique partageable qui redonne une cohésion et une confiance collective. L'humanisme pourrait être un antidote à la vision utilitariste de l'homme, au vide idéologique contemporain, tout comme aux extrémismes religieux. L'humanisme est une doctrine suffisamment large pour qu'elle soit reprise par beaucoup de personnes de bonne volonté. Mais, il nous faut redéfinir l'humanisme, car si l'on veut qu'il soit efficace, il faut un humanisme sans complaisance.
Mettre l’homme en avant ne suffit pas, car la barbarie est – hélas – très humaine. Chaque homme peut aussi bien devenir un monstre stupide, ignorant, avide, sadique, haineux, qu’un sage empathique, savant, créatif et altruiste. Il peut surtout devenir une victime de l’idéologie. Les pires barbaries ont presque toujours été commises au nom de principes idéologiques et religieux : guerres de religion en Europe, massacres des juifs sous le nazisme, assassinats de masse sous le communisme. C’est toujours au nom de croyances idéologiques et religieuses – ce qui est le propre de l’homme – que le plus inhumain est perpétré.
L'humanisme ne peut être une simple idéalisation de l’homme. Il faut le définir autrement et mieux. Pour cela l’humanité (au sens d'un devenir de l'homme) est une notion intéressante. L'usage linguistique a consacré les termes d'humain et d'humanité pour signifier digne, sage et empathique. Par opposition, en cas de violence destructrice pour les individus et désorganisatrice pour la sociabilité, on parle de barbarie. La locution "avoir de l'humanité" désigne le respect et la sociabilité, qualités nécessaires pour une vie harmonieuse. Dans cette perspective, l'éthique humaniste consiste à faire en sorte que l'humanité, possible mais pas certaine, chez l'homo-sapiens, advienne. L'humanité est à construire par l'éducation et collectivement par l'avancée civilisationnelle. Pour que l'humanisme soit efficace, il faut qu'il soit à la fois volontariste, sans complaisance et soutenu par le droit. Les deux déclarations sur les droits de l'Homme (Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 et la Déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948) sont à ce titre essentielles.
Voir l'article : Humanité ou sagesse ?