Philosophie et actualité
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- Écrit par : Guillaume Bazot
Selon Guillaume Bazot « Aucun élément statistique ne permet de constater une détérioration du pouvoir d’achat des Français, ni une hausse des inégalités de revenu, depuis 30 ans. La hausse de la taxation des hauts revenus, des dépenses sociales et celle, plus légère, des revenus alloués au travail l’expliquent en partie. La situation s’avère assez stable depuis 30 ans, notamment grâce à la progressivité du système d’imposition et à la protection sociale. L’histoire du vingtième siècle regorge de faux diagnostics produisant plus de désordres et de souffrances que le soi-disant mal qu’ils devaient combattre ».
Nous resterons prudent sur le diagnostic de l'auteur, car il semble bien qu'une partie de la population s'appauvrisse. Mais force est de constater que de nombreux médias se livrent au catastrophisme et au dénigrement systématique. Une idéologie de la négativité s'est emparé des médias et des réseaux sociaux.
BAZOT, Guillaume. Les inégalités s’accroissent-elles vraiment ? Niveau de vie, mobilité sociale et répartition en France. In : La vie des idées. 2 juin 2020. https://laviedesidees.fr/Les-inegalites-s-accroissent-elles-vraiment.html
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- Écrit par : Patrick Juignet
Pour certains, une situation d’urgence comme celle de la pandémie permettrait de s’affranchir des règles habituelles en médecine. La pandémie serait comme une opération de secourisme ou de combat, dans laquelle il faudrait improviser et agir vite. Pourtant, un urgentiste confirmé sait que c'est l’inverse : dans l’urgence, il faut appliquer calmement les protocoles pour éviter d’empirer la situation. La règle du primum non nocere vaut encore plus que dans toute autre situation.
Une série d'arguments permettent de rejeter l’idée qu’il faille s’affranchir des règles en situation d’urgence pandémique.
1 - la méthodologie permet d’obtenir des données fiables dégagées des intérêts privés (intérêts de médiatisation personnelle ou de commercialisation pharmaceutique).
2 - les essais cliniques sérieux permettent de s’assurer qu’un nouveau traitement n’empire pas l’état des patients et cela évite une surmortalité, ce qui est quand même primordial.
3 - la métholodogie permet de dépasser la conviction individuelle (d’une personne ou d'une équipe) concernant l’efficacité de son traitement, qui n’est pas un indicateur fiable, surtout dans l'empressement.
4 - ne pas respecter les règles et préférer des essais rapides peu probants retardera la formation d'un consensus justifié et les mesures efficaces.
L'épistémologie d'une science appliquée comme la médecine nous apprend qu'elle est particulière. Elle est en butte à des biais cognitifs dus à son caractère humain, biais qu'il faut sans cesse combattre pour éviter que le charlatanisme ne s'en empare.
Voir l'article complet : L’urgence de la pandémie ne justifie pas de s’affranchir des règles en médecine
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- Écrit par : Patrick Juignet
Une question de méthode ?
La méthode qui permet de déterminer l'efficacité d'un traitement en médecine est une construction sociale qui s'est mise au point progressivement dans le champ de cette science particulière : elle est appliquée (ni fondamentale, ni exacte) et, qui plus est, elle est appliquée à des humains et par des humains, ce qui introduit des biais.
La méthode mise au point impose des normes rationnelles, non spécifiques, comme des conditions similaires et comparables et un nombre suffisant de patients pour que les essais soient significatifs. Elle impose aussi des normes spéciales pour déjouer les biais subjectifs et sociaux qui interviennent très facilement dans le champ de l'humain (pour cela les essais sont faits en double aveugle).
En médecine, si la méthodologie est respectée, elle facilite l'accord entre les pairs.
Une remise en cause médiatique de la méthode
La méthode n'est pas toujours respectée à cause de falsifications plus ou moins volontaires. Elle peut aussi être refusée. Mais pourquoi ? Le refus de la méthode commune est une prétention à imposer arbitrairement son opinion. "Moi, je sais mieux que la communauté scientifique, au titre de mon intuition". Mais pas seulement, car dans le cas de l'utilisation des antipaludéens contre la Covid-19, le procédé est populiste. On fait valoir le bon sens populaire contre la méthode des "élites".
La mise en avant médiatisée de l'hydroxychloroquine, de la chloroquine et de l'Artemisia Annua, est un problème qui n'est pas scientifique, c'est un procédé de propagande populiste : on vante publiquement le bon médicament, qui est le vieux remède des familles, l'antipalu que tout le monde connaît, la bonne tisane naturelle, contre l'avis des "experts".
Les raisons de la médiatisation outrancière d'un remède incertain sont politico-médiatiques. Il s'agit de se mettre en avant comme sauveur, tout en se montrant anti-élite. On est passé d'un problème de méthode (le sérieux, la scientificité de la connaissance) pour entrer dans un problème médiatico-politique (la propagande et la manipulation des populations).
Le rétablissement réglementaire et sa suite
Le 24 mai 2020, le HCSP a publié de nouvelles recommandations relative à l'utilisation de l'hydroxychloroquine, selon lesquelles l'hydroxychloroquine (seule ou associée à un macrolide) ne doit plus être utilisée dans le traitement COVID-19 en raison du manque d'efficacité et des effets toxiques sur le cœur. Du coup, on voit qu'une autorité politico-administrative responsable doit intervenir pour faire respecter le savoir médical reconnu. Mécontentant au passage la partie de la population convaincue de ce que le remède miracle était le bon. Puis, de nouvelles études sont relancées. Il est quand même étonnant que l'on n'arrive pas à avoir un avis sérieux sur la question ! Mais la recherche n'est pas l'acquis c'est.. la recherche, avec ses incertitudes.
En savoir plus : Épidémie de Covid-19 : savoir et politique (3)
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- Écrit par : Patrick Juignet
Michel Piccoli nous a quitté.
« J'ai joué à avoir plusieurs vies. »
Dans A Voix Nue, sur France Culture, il exprimait son inquiétude face à la vie politique :
« Nous sommes abandonnés, la politique nous abandonne. Mais c'est beaucoup plus grave qu'on ne le croit. La mondialisation achète tout, pille les pays, c'est une machine banquière, guerrière mondiale gigantesque : Il y a des machines qui nous endorment, qui savent nous endormir dans un bien-être du sport, de la farce, du pornographique : je parle de la télévision qui "enconarde" le monde entier. [...] Nous sommes doublement manipulés par des fantômes gigantesques qui achètent les pays, qui vendent les pays et par la communication, la grande communication des télévisions qui nous endort dans le confort de l'achat. Plus vous achèterez, plus vous serez heureux.»
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- Écrit par : Patrick Juignet
L’arrêt de la Cours Constitutionnelle Allemande du 5 mai 2020 est une illustration pratique d’un cas de philosophie politique. En pleine pandémie, au moment où certains gouvernants promettent que « rien ne sera comme avant » et qu’il y aura « un monde d’après », la Cour Constitutionnelle Allemande condamne la politique monétaire de la BCE qui aide les États en rachetant leurs dettes publiques (la BCE a lancé en mars un énorme « plan pandémie » de 750 milliards d’euros d’achats de titres).
Cette décision de la Cours est une conséquence du dogme allemand sur la monnaie. La « doctrine monétariste » allemande est stricte. On la nomme « ordolibéralisme ». Elle est attachée à l’indépendance de la Banque centrale tout comme n’importe quelle autre variante du monétarisme, mais elle vise la stabilité des prix dans le cadre d’une doctrine purement anti-inflationniste et rejette toute forme d’intervention monétaire dans les affaires économiques. Cette idée de séparer monnaie et économie est critiquée, entre autre, par l’école keynésienne. La Cours défend cette conception, qui est la conception allemande depuis le début de la création de l'Union Européenne.
Mais, cette décision est aussi l’effet d'une tendance à défendre des dogmes économiques et idéologiques sans cesse résurgente, car l’Allemagne n'a pas intérêt, dans l'immédiat, à une telle politique. Deux visions s'opposent sans cesse en Europe : l’une selon laquelle, face à la globalisation, l’union (européenne) fait la force et, l’autre, qui suppose que des États, isolés et concurrents, peuvent s’en tirer seuls plus facilement (exemple le Brexit).
Au final, c’est une question de philosophie politique : l'union et l’entraide, dans une situation difficile, valent-elles plus politiquement que l’intérêt de tel ou tel pays qui est momentanément perdant ? L'enjeu est d'importance, car la puissance d’une institution commune comme la BCE est décisive pour l'économie.
En savoir plus : Épidémide de Covid-19 : savoir et politique (3)