Actualités philosophiques, scientifiques et sociétales
Quel usage de la science fondamentale ?
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- Écrit par : Patrick Juignet
Le travail scientifique fondamental n’a pas d'applications techniques immédiates, utilisables dans l’industrie avec un retentissement économique rapide. Mais, il a quand même des effets de ce type à plus ou moins long terme. Donnons des exemples de ce décalage temporel entre les applications et les découvertes initiales.
Albert Einstein a créé des équations pour le laser en 1917, mais ce n’est qu’en 1960 que Theodore Maiman a fait la première démonstration du laser. Isidor Rabi a mesuré la résonance magnétique nucléaire la première fois en 1938. Il a reçu le Prix Nobel de physique en 1944 pour sa recherche, qui a mené à l’invention de l’imagerie par résonance magnétique ou IRM. Mais, le premier examen par IRM sur un patient humain a eu lieu en 1977.
Le dernier prix Nobel de Physique a été décerné en décembre 2018 à Donna Strickland et Gérard Mourou pour des recherches sur les lasers. Les résultats ont changé la façon dont on explique l’interaction des atomes avec la lumière à haute intensité. Cette recherche développée vers 1985 a eu, après une décennie, des applications pratiques dans la découpe fine des matériaux, ce qui a un intérêt en chirurgie ou dans l'industrie
L'idée d'une science fondamentale inutile, car sans sans effets pratiques, est sans fondement. Le vrai problème est ailleurs. C'est celui de savoir quel usage sera fait des techniques découlant des découvertes. Il faut questionner à chaque fois le projet économique et politique pour lequel ces techniques sont utilisées. Se pose aussi le problème des effets sociaux de cet emploi de technologies nouvelles, effets peu prévisibles, le plus souvent déstabilisants. L'utilisation - ou pas - de techniques nouvelles a toujours une dimension économique et sociale ; elle dépend de choix qui sont de nature politique.
Philosophies de la ressemblance
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- Écrit par : Philosophia Scientiæ
Personne ne nierait que les chats se ressemblent sous un grand nombre de rapports, ni ne douterait du fait qu’ils ressemblent plus aux chiens qu’aux bactéries. Il semble légitime de croire que c’est en vertu d'une similarité d’ensemble que nous pouvons dire que certains individus appartiennent à une même espèce. Ces intuitions partagées suggèrent que la ressemblance jouerait un rôle sur le plan épistémique. Elle sous-tendrait nos classifications et taxonomies, et serait à la source des raisonnements analogiques et inductifs.
Cette place de la ressemblance dans le discours ordinaire et scientifique appelle des hypothèses métaphysiques ou ontologiques. Pour certains, nos jugements de ressemblance seraient ultimement dépendants de (et justifiés par) une organisation intrinsèque de la réalité. Il y a, en épistémologie et en philosophie des sciences, un écho direct à ces discussions sur le concept de ressemblance. Toute démarche inductive a partie liée avec le repérage de régularités qui se jouent au niveau des phénomènes naturels. Il revient ainsi au scientifique d’identifier des événements qui se répètent et donc de définir – sinon de construire – un format pour la ressemblance signifiante. Souvent, le scientifique doit prendre des décisions normatives – tout à la fois pratiques et théoriques - relativement au type de ressemblance retenu comme pertinent dans un contexte donné et dans une discipline particulière. Mais, que faire de telles décisions ?
Quand l’arrogance remplace la connaissance
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- Écrit par : Patrick Juignet
Donald Trump décide qu’il n’y pas de réchauffement climatique. Le gouvernement de Matteo Salvini déclare les vaccins dangereux et les usines d’incinération inutiles. Les syndicats agricoles déclarent que le glyphosate et autres herbicides/pesticides ne sont pas nuisibles à la santé. Les exemples de ce type sont innombrables. Des responsables politiques donnent leurs opinions pour vraies, contre le savoir acquis scientifiquement.
Les efforts faits depuis le siècle des Lumières pour asseoir la réflexion et les pratiques sur un savoir scientifiquement fondé finissent par être discrédités. Il n’y plus de vérité, on ment sans honte et avec aplomb. Plus besoin d’argumenter, il suffit d’affirmer ; l’arrogance et la suffisance remplacent la connaissance.
L’opinion sans fondement s’affirme en face des savoirs fondés scientifiquement. Il s'agit de faire valoir ce qui arrange sur un plan économique, ce qui satisfait des intérêts politiques ou financiers. Il s’agit de faire valoir une opinion et le plus fort médiatiquement a raison. Que nous soyons tombés aussi bas au XXIe siècle en Occident après tant d'efforts de moralisation et de rationalisation de la vie publique est désespérant.
Stupéfiante évolution civilisationnelle ! Comment cela peut-il être accepté ? On peut y voir la faillite d’un système éducatif qui a négligé d’enseigner ce que sont le sérieux, la vérité, la validité des savoirs, la vérification de faits, la connaissance scientifique. On peut y voir aussi aussi les effets dissolvants du scepticisme post-moderne et le retour à la vieille confusion entre vérité et opinion majoritaire ou idées imposées autoritairement, confondant ainsi la vérité et la volonté des puissants.