Actualités philosophiques, scientifiques et sociétales
Pascal Engel et les vices du savoir
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- Écrit par : Patrick Juignet
Pascal Engel définit la vérité comme la correspondance avec les faits.
Dans notre culture occidentale contemporaine, la vérité n'a plus beaucoup de place. Ne pas respecter la vérité démonstrative, c'est admettre que le pouvoir et la force sont les sources de l’autorité (voir la définition de l'alètheia). Les penseurs post‑modernes, en prônant le relativisme, la pluralité des savoirs, ont œuvré au dénigrement de la vérité. Ils pensaient ouvrir la porte à d’autres valeurs, comme la pluralité, la lutte contre l'autorité, la critique du pouvoir.
L'irrespect de la vérité, qui a comme conséquences le règne du cynisme et du mensonge, nous a livré à la recrudescence des croyances, de la propagande éhontée et des fake news.
Ni réductible à l’éthique tout court ni simple branche de l’épistémologie, l’éthique intellectuelle soutenue par Pascal Engel définit les normes qui permettent la correction des croyances. Dans ce livre, il montre que l’indifférence à leur égard constitue la forme la plus aboutie du vice intellectuel et sape, dans la cité, la possibilité d’une démocratie véritable.
L’éthique intellectuelle se fonde sur la nature du jugement et de la croyance. Elle permet de comprendre ce qu’il y a de condamnable dans « le plagiat, la fraude scientifique, l’usurpation de compétences, la création d’officines pseudo-scientifiques ou l’utilisation des institutions de savoir à des fins de prosélytisme ». Elle dit pourquoi on peut réprouver les intellectuels « irresponsables et vaniteux, les journalistes sans scrupules, nos médias et nos “réseaux sociaux” trompeurs à l’échelle planétaire, nos écrivains filous, nos professeurs incompétents, nos étudiants paresseux ».
« Dans ce livre, j'essaye de remonter aux sources de l'activité intellectuelle pour en dériver les conditions de correction ».
Engel P. Les Vices du savoir. Essai d'éthique intellectuelle, Agone, 2019.
Liberté, égalité, modernité
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- Écrit par : Patrick Juignet
Entre novembre 1753 et février 1754, Jean-Jacques Rousseau écrivit le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, dans lequel il raconte une histoire de l'humanité débutant par un hypothétique état de nature, suivi de la genèse de l'état social. Ce récit ne tient pas au vu du savoir scientifique, c'est une fiction, mais l'éthique qu'il illustre est un idéal qui reste d'actualité.
Cette éthique s'ordonne selon deux principes majeurs : la liberté et l'égalité. Jean-Jacques Rousseau ne fait pas appel seulement à la raison, mais aussi au sentiment pour justifier son point de vue.
Avec Du contrat social écrit entre 1760 et 1762, Jean-Jacques Rousseau cherche le fondement légitime de l'exercice du pouvoir. Un contrat social est l'acte intellectuel par lequel une population devient un peuple en fondant un État de droit. Par là, il recouvre sa liberté, car il n'est plus asservi par la force.
En défendant les idées de liberté, d'égalité et de contrat social, Rousseau est un précurseur de la modernité. La liberté et l'égalité sont le résultat d'un combat à mener à la fois contre les tendances prédatrices et dominatrices de très nombreux humains, et contre le contrôle et l'asservissement par les États autoritaires. Liberté et égalité sont les principes d'une vie sociale décente, à défendre par des lois et des institutions protectrices.
Entretien avec Quentin Skinner
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- Écrit par : Patrick Juignet
Quentin Skinner, professeur à l’Université Queen Mary de Londres, est un historien des idées politiques. Il est considéré comme le fondateur de ce qu’on appelle « l’École de Cambridge », selon laquelle les œuvres de philosophie morale et politique doivent être comprises dans le contexte historique qui a présidé à leur édification.
Selon l'hypothèse de départ de Skinner, on doit distinguer, au sein du langage, deux dimensions complémentaires, mais séparées. L’une concerne ce que l’on a traditionnellement nommé la signification et l’autre concerne le langage comme forme d’action sociale.
Dans cette optique, les œuvres sont considérées comme étant avant tout des actes de langage. Elles ont une visée pratique que l’interprète doit mettre au jour s’il ne veut pas se tromper sur ce qu'elles sont. Comme tout énoncé, les textes qu’on étudie ont une force intentionnelle que l’histoire des idées a pour tâche de ressaisir. Le corpus considéré est celui des textes philosophiques et littéraires à portée politique.
Quentin Skinner emprunte à Wittgenstein l’idée que face à n’importe quel énoncé, l’une des questions à se poser est : que fait le locuteur en formulant cet énoncé ? Autrement dit, il nous faut essentiellement envisager nos concepts et leur expression verbale comme des outils – voire comme des armes, pour reprendre la formule qu’affectionnait Nietzsche.
Florent Guénard nous livre l'entretien qu'il a eu avec l'auteur le 3 mai 2019 dans La vie des idées.
Entretien avec Quentin Skinner : Ce que la philosophie veut dire