Écrit par : Patrick Juignet

Le naturalisme, en philosophie, considère que l'ensemble du Monde est naturel. Cette option implique un fonctionnement autonome de la Nature qui serait tout. Cette manière d'envisager le Monde a existé dès l'Antiquité, mais a pris une nouvelle forme à partir du XVIIe siècle avec le développement de la science moderne. On peut distinguer divers naturalismes.

Le naturalisme panthéiste prend forme avec Spinoza. Pour Spinoza Dieu est la Nature. La Nature est simplement un aspect ou une modalité de la substance divine. Il distingue la Natura naturans qui est Dieu, en tant que créateur et principe de toute action et la Natura naturatala qui est l'ensemble des êtres et des lois qu'il a créés.

Pour le naturalisme animiste tous les éléments de la nature possèdent une âme ou une essence spirituelle. Dans cette perspective, la nature est habitée par des esprits ou des divinités. Pour le naturalisme vitaliste, la nature est une totalité vivante complexe et autonome (Henri Bergson). Les deux naturalismes peuvent se combinent, par exemple, avec Raymond Ruyer qui défend un « néo-finalisme ». Sa doctrine réintègre l’homme dans une philosophie de la vie culminant dans une théologie naturelle à tendance panthéiste.

En  complète opposition, le naturalisme matérialiste considère que la Nature est déterminée et exempte de surnaturel. La réalité naturelle suit des enchaînements réguliers et l’homme peut en découvrir les lois. Les tenants de ce naturalisme adoptent souvent un point de vue mécaniste et matérialiste rigide. Le naturalisme contemporain d'auteurs comme Willard Van Orman Quine, Hilary Putnam et Daniel Dennett est de ce type. 

L'extension naturaliste à la totalité engendre des difficultés :   

- La définition première de la nature comme environnement terrestre ne la prédispose pas à être tout. La nature désigne en premier lieu ce qui entoure l’Homme et au sein de quoi il vit. L’idée la plus centrale concernant la nature est celle d’un développement spontané des êtres vivants. 

- Si la totalité de ce qui existe constitue le Monde, l'utilité de l'identifier à la « Nature » n'est pas évidente. Il y a un forçage du terme qui n'est pas forcément heureux. Pour le naturalisme matérialiste, le surnaturel que l'on veut gommer reparaît en creux. Pourquoi qualifier le Monde de naturel, s'il n'existe aucun surnaturel ? 

- Le naturalisme matérialiste a tendance à nier la spécificité humaine, et à défendre un réductionnisme biologisant. L'Homme serait un animal comme les autres sans particularités distinctives nettes. Les  sociétés humaines seraient un développement naturel dû à l'évolution. Distinguer ce qui est régi par un déterminisme éco-systémique et ce qui ressortit des règles socioculturelles a cependant un intérêt.

Le terme de « naturalisme » a également trait à la nature au sens de l'environnement, comme c'est le cas pour le naturalisme en peinture qui cherche à reproduire de manière réaliste ce qui entoure le peintre, tel que les paysages ou les scènes de la vie quotidienne. Les savants dits « naturalistes », s'occupent de sciences telles que la botanique, la minéralogie, la zoologie, la géologie, etc., qualifiées ainsi par opposition aux sciences exactes.

 

Voir : Nature