Écrit par : Patrick Juignet
Catégorie : Vocabulaire philosophique

Le terme de « vérité » qualifie une affirmation à laquelle on accorde un crédit. La question du vrai se pose différemment selon les circonstances : elle n’est pas la même au quotidien, dans le domaine politique et religieux, pour le savoir philosophique ou la connaissance scientifique.

Au quotidien, une proposition concernant un fait concret peut, grâce à l’expérience concrète, être déclarée vraie ou fausse. Il suffit de constater le fait allégué pour juger de la vérité de l'allégation. Une proposition psychologique est moins facilement vérifiable, mais, par un effort d’analyse réflexive, on peut se rapprocher du vrai. Le vrai est l'adéquation aux faits. Le mensonge nie ou travestit les faits.

Dans le domaine politique, la vérité ou parrêsia concerne le discours public. Ce « dire vrai » s'oppose au dogme idéologique ou au discours mensonger. Dans ce cas, le jugement sur la vérité ou la fausseté du discours demande un savoir suffisant sur ce qui est affirmé et la détection des ruses rhétoriques du locuteur. Là aussi, le mensonge nie ou travestit les faits, mais sa détection est plus difficile.

Dans le domaine des savoirs complexes et abstraits, la vérité a d’autres conditions. Deux conceptions s’opposent :

Il existe des cas particuliers. Certaines propositions sont inaccessibles à la vérification, parce que leur sens est flou, paradoxal, ou qu'elles participent d'une dimension fictive ou métaphysique. « L'actuel roi de France est chauve », exemple donné par Bertrand Russell, n’est ni vrai ni faux, car l'actuel roi de France n'existe pas, si bien que l'énoncé ne peut être validé. Il en est de même des croyances religieuses et idéologiques. Les donner pour vraies est une imposture, elles ne sont pas du domaine du vérifiable (voir alètheia).

Entrer dans le domaine du vérifiable est crucial pour la science et la philosophie, car une proposition invérifiable peut être remplacée indifféremment par toute autre ; elle rentre dans la catégorie des fictions ou des opinions. Par contraste, la possibilité de sa démonstration rend la proposition partageable par tous (universalisable) et éventuellement contestable, comme fausse ou insuffisante.

Dans les sciences, la vérité demande des conditions démonstratives strictes : théoriques (rationalité, formalisme), empiriques (utilisation d'une méthode empirique appropriée) et l’inscription du problème dans un paradigme épistémique admissible. Même avec ces conditions drastiques, la relativité eu égard aux possibilités de la connaissance tend à faire parler de vérisimilitude plutôt que de vérité.

La vérité se montre empiriquement, ou se démontre rationnellement, elle ne s’impose, ni ne se révèle, ni ne se dévoile.