Actualités philosophiques, scientifiques et sociétales
Un cerveau sans vie en neurobiologie ?
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- Écrit par : Patrick Juignet
Pour Romain Brette, chercheur à l'Inserm, les neurosciences sont dominées par deux paradigmes centraux.
Selon le premier, le cerveau est une sorte d’ordinateur : les neurones implémentent des algorithmes dont les variables sont représentées par leur activité électrique. Ce point de vue est partagé par le computationnalisme classique comme par le connexionnisme. Le deuxième paradigme est une démarche réductionniste qui envisage le cerveau comme une collection de composants élémentaires dont il s’agit de mesurer précisément les propriétés et l’assemblage, par le biais de mesures systématiques (génome, protéome, connectome, etc.). Ces deux paradigmes ont en commun de faire abstraction du fait que le système nerveux soit un tissu vivant, or c'est le cas sans discussion possible.
La biologie théorique qui s'applique au cerveau en tant qu'organe vivant montre que ces deux paradigmes sont fondés sur des prémisses erronées. Premièrement, il ne peut y avoir dans un organisme vivant de distinction entre matériel (invariant) et logiciel (modifiable), ce qui rend le modèle de l’ordinateur intenable. Deuxièmement, le vivant est une propriété de l’organisation des processus, qui ne peut se prêter à une analyse réductionniste de ses composants. Tant le cerveau-ordinateur que le cerveau-Lego sont incompatibles avec le cerveau considéré comme vivant.
On voit que les paradigmes utilisés neurosciences ne sont pas encore solidement établis.
Traces du passé selon Carlo Rovelli
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- Écrit par : Selma Mehyaoui
Carlo Rovelli est physicien. Entre autres ouvrages, il a publié L'ordre du temps (Flammarion, collection Champs Sciences, 2018, pour la traduction française) qui résume ses recherches et réflexions sur le temps dans un style clair et accessible. Dans Memory and entropy, un article publié en mars 2020, il expose sa théorie sur la mémoire, ou plutôt sur les traces qui la constituent. Notons bien qu'il s'agit des traces du passé dans l'Univers au niveau physique. Selon Rovelli, ces traces sont la mémoire, et en comprendre les mécanismes est solidaire d'une exploration de notre "temps psychologique". Un article, dans la section "Philosophie de la physique", est consacré à ce travail de Rovelli : il a été relu et approuvé par le physicien lui-même. Son but est de rendre cette recherche en physique accessible à tous. La théorie de Carlo Rovelli est belle, simple, succincte (l'article original fait quatre pages seulement) : élégante, elle mérite d'être connue.
Voir : Mémoire et entropie
La destruction créatrice
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- Écrit par : Patrick Juignet
La théorie dite de la « destruction créatrice » a été développée par l'économiste autrichien Joseph Aloïs Schumpeter pour expliquer les mouvements cycliques de la croissance économique. L’idée apparaît en 1911 dans Théorie du développement économique, lorsque Schumpeter note que les innovations (de toutes sortes, mais surtout techniques) créent de nouveaux développements économiques qui provoquent la disparition des entreprises devenues obsolètes ou non-compétitives. Ce sont des « processus de mutation industrielle […] qui révolutionne incessamment de l'intérieur la structure économique, en détruisant les éléments vieillis et en créant continuellement des éléments neufs. » (p.116). Schumpeter a ensuite développé cette théorie dans d’autres travaux. Dans Le Cycle des affaires, publié en 1939, il montre que les cycles économiques dépendent des innovations et, en particulier, des « grappes d'innovation ». Cela signifie qu’un progrès scientifique ou technique (par exemple : la machine à vapeur) amène avec lui d'autres innovations portées par cette découverte et que l’ensemble est pour un temps un facteur de mutation et de développement économique.
Voir : La destruction créatrice et ses limites