Actualités philosophiques, scientifiques et sociétales
Liberté, égalité, modernité
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- Écrit par : Patrick Juignet
Entre novembre 1753 et février 1754, Jean-Jacques Rousseau écrivit le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, dans lequel il raconte une histoire de l'humanité débutant par un hypothétique état de nature, suivi de la genèse de l'état social. Ce récit ne tient pas au vu du savoir scientifique, c'est une fiction, mais l'éthique qu'il illustre est un idéal qui reste d'actualité.
Cette éthique s'ordonne selon deux principes majeurs : la liberté et l'égalité. Jean-Jacques Rousseau ne fait pas appel seulement à la raison, mais aussi au sentiment pour justifier son point de vue.
Avec Du contrat social écrit entre 1760 et 1762, Jean-Jacques Rousseau cherche le fondement légitime de l'exercice du pouvoir. Un contrat social est l'acte intellectuel par lequel une population devient un peuple en fondant un État de droit. Par là, il recouvre sa liberté, car il n'est plus asservi par la force.
En défendant les idées de liberté, d'égalité et de contrat social, Rousseau est un précurseur de la modernité. La liberté et l'égalité sont le résultat d'un combat à mener à la fois contre les tendances prédatrices et dominatrices de très nombreux humains, et contre le contrôle et l'asservissement par les États autoritaires. Liberté et égalité sont les principes d'une vie sociale décente, à défendre par des lois et des institutions protectrices.
Entretien avec Quentin Skinner
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- Écrit par : Patrick Juignet
Quentin Skinner, professeur à l’Université Queen Mary de Londres, est un historien des idées politiques. Il est considéré comme le fondateur de ce qu’on appelle « l’École de Cambridge », selon laquelle les œuvres de philosophie morale et politique doivent être comprises dans le contexte historique qui a présidé à leur édification.
Selon l'hypothèse de départ de Skinner, on doit distinguer, au sein du langage, deux dimensions complémentaires, mais séparées. L’une concerne ce que l’on a traditionnellement nommé la signification et l’autre concerne le langage comme forme d’action sociale.
Dans cette optique, les œuvres sont considérées comme étant avant tout des actes de langage. Elles ont une visée pratique que l’interprète doit mettre au jour s’il ne veut pas se tromper sur ce qu'elles sont. Comme tout énoncé, les textes qu’on étudie ont une force intentionnelle que l’histoire des idées a pour tâche de ressaisir. Le corpus considéré est celui des textes philosophiques et littéraires à portée politique.
Quentin Skinner emprunte à Wittgenstein l’idée que face à n’importe quel énoncé, l’une des questions à se poser est : que fait le locuteur en formulant cet énoncé ? Autrement dit, il nous faut essentiellement envisager nos concepts et leur expression verbale comme des outils – voire comme des armes, pour reprendre la formule qu’affectionnait Nietzsche.
Florent Guénard nous livre l'entretien qu'il a eu avec l'auteur le 3 mai 2019 dans La vie des idées.
Entretien avec Quentin Skinner : Ce que la philosophie veut dire
Hyman Minsky : un économiste visionnaire
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- Écrit par : Laurence Scialom
L’économiste américain d’origine russe Hyman Minsky accordait une place centrale à la finance dans le fonctionnement des économies capitalistes. Cent ans après sa naissance, la crise de 2008-2009 remet en avant la pertinence de ses analyses sur l’instabilité financière et l'intérêt de ses pistes de réflexion sur les mécanismes qui pourraient la contenir.
Il partageait avec Keynes et Schumpeter un intérêt pour les cycles et pour les dynamiques de transformation du capitalisme. Il rejetait comme eux le concept d’équilibre, fondement de l’économie néo-classique, ainsi que l’approche désincarnée de l’économie qui l’accompagne.
Pour Minsky, le capitalisme se révolutionne, se transforme et se recompose sans cesse sous la pression de forces endogènes. Son œuvre cherche à éclairer, analyser et comprendre ces mutations profondes et permanentes du capitalisme, son instabilité et le rôle de la finance dans ces dynamiques. Il pensait dans la filiation directe de John Maynard Keynes, qui avait eu l’intuition géniale de décrypter l’économie sous le prisme de la finance.
Stabiliser une économie instable, publié en 1986, est l’ouvrage le plus complet et le plus abouti d’Hyman Minsky. Au moment de sa publication, ce livre est complètement à contre-courant, car le néo-libéralisme domine alors la pensée économique et c'est la doxa des décideurs politiques et de la haute administration. Hyman Minsky prêche alors dans le vide et il est perçu comme un oracle de mauvais augure. Le livre a été réédité en anglais en 2008 (crise financière oblige) et il a été traduit en français seulement en 2015.
Dans la conception minskyenne, les marchés ne sont pas auto-régulateurs. Au contraire, ils participent à l’aveuglement général qui empêche de voir venir la crise financière. Celle-ci s’enracine dans la période de boom financier et d’optimisme économique qui se caractérise par le renchérissement des actifs financiers et immobiliers et l’expansion rapide du crédit, les deux se renforçant mutuellement.
Pour en savoir plus : Hyman Minsky : un économiste visionnaire